Sogerma : eads doit payer!

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Crash d’emplois sur toute la Gironde
Sogerma . Le groupe EADS a annoncé la fermeture de sa filiale de maintenance aéronautique civile et militaire de Mérignac, malgré des résultats exceptionnels accumulés.

Mérignac (Gironde),

correspondant régional.

En fin d’après-midi, vendredi, puis tout au long du week-end, un véritable coup de tabac s’est abattu sur l’usine et la ville. Le conseil d’administration du groupe aéronautique et de défense EADS, réuni à Amsterdam, venait d’annoncer par un communiqué qu’il mettait fin aux activités du site de Mérignac, qui abrite à la fois le siège social d’EADS Sogerma et le plus important atelier industriel de maintenance d’avions civils et militaires. Par cette décision brutale, 1 050 emplois, sans compter les cinq à six mille autres induits, sont ainsi rayés de la carte dans cette zone située à l’ouest de Bordeaux. Dans le communiqué d’EADS, il est précisé que doivent « être arrêtées les activités déficitaires sans perspectives de rentabilité », le groupe pointant « comme facteurs négatifs : la domination des marchés à bas coûts de main-d’oeuvre, la perte du marché de maintenance militaire, l’échec des diversifications... ».

Coup de poignard sur l’emploi

L’usine de Mérignac, qui accumulait déjà trois plans successifs de réductions d’emplois, traverse une nouvelle zone de turbulences depuis décembre dernier avec l’arrêt annoncé des activités de maintenance civile. L’inquiétude des personnels s’est subitement avivée le 8 mars lorsque le coprésident d’EADS, Noël Forgeard, a qualifié de « catastrophique » la situation de Sogerma, accusant une perte de 237 millions d’euros. Les salariés, à l’appel de l’intersyndicale - CGT, CFDT, CFE-CGC et FO -, plaçaient alors l’usine sous haute surveillance sociale, en multipliant les manifestations toutes aussi spectaculaires que massives dans l’agglomération bordelaise, mais aussi à Toulouse où l’autre filiale d’EADS, le constructeur Airbus, accumule d’excellents résultats industriels et financiers.

Le tollé provoqué par la décision de fermeture est d’autant plus général que le groupe aéronautique a dégagé pour 2005 un résultat net record de 1,7 milliard d’euros, en progression de 39 %, et que chacun pouvait espérer une forme de « solidarité » par des transferts de charges de travail d’Airbus vers Sogerma Mérignac. Alors qu’un pôle de compétitivité aéronautique commun à Midi-Pyrénées et Aquitaine a été mis en place, ce coup de poignard contre l’emploi aéronautique girondin en dit long, pour ne pas dire plus, sur la portée et le rôle de ces dispositifs.

Dès samedi matin, le député maire (PS) de Mérignac a réuni un conseil municipal extraordinaire. Une motion votée à l’unanimité des conseillers qualifie cette fermeture de « sinistre d’ampleur nationale ». Elle dénonce tout à la fois la totale absence de stratégie industrielle pour Sogerma de la part d’EADS et un gouvernement qui « affiche un patriotisme économique de façade et se désintéresse des conséquences humaines de choix purement financiers ».

Fermeture inacceptable

Délégué central CFE-CGC et porte-parole de l’intersyndicale, Vincent Loizeau dénonce des décisions à ses yeux incompréhensibles : « Il y a eu des investissements importants sur des hangars du site, et aujourd’hui on nous dit que ça ne sert à rien, que nous ne sommes plus rentables ! » Le problème pour Sogerma est aussi politique, poursuit-il : « Pour l’encadrement, la cessation d’activités ici apparaît comme une compensation entre Français et Allemands. »

pour faire

reculer EADS

Les réactions dans la région sont unanimes pour condamner cette décision d’EADS. Le député et maire (UMP) de Bordeaux, Hugues Martin, s’est dit « stupéfait ». La fermeture est jugée « inacceptable » et qualifiée d’« acte meurtrier pour les compétences aéronautiques bordelaises » par le président (PS) du conseil régional, Alain Rousset. « Il est paradoxal, souligne-t-il, de faire le choix de fermer un site comprenant un millier d’emplois, une école de maintenance aéronautique, alors même qu’EADS connaît des résultats record. » Vice-président communiste de la communauté urbaine de Bordeaux (CUB), Max Guichard estime qu’une telle décision peut être remise en question à condition que « le pouvoir politique impose une autre logique de gestion économique ». C’est pourquoi, afin de permettre à l’ensemble des élus d’intervenir dans ce sens, il propose la tenue d’urgence d’un conseil de CUB extraordinaire. À l’appui de la mobilisation populaire victorieuse contre le CPE, et afin de « favoriser une dynamique unitaire pour faire reculer EADS », Michel Dubertrand, secrétaire départemental du PCF, a convié l’ensemble des partis de gauche girondins à une réunion commune. Elle devait se tenir hier en fin d’après-midi.

Alain Raynal




Article paru dans l'édition du 15 mai 2006.