Tomu Uchida

Tomu Uchida devrait figurer parmi des réalisateurs de la trempe d'un Kurosawa, d'un Ozu ou d'un Mizoguchi; au lieu de cela la récente réédition d'un coffret par Wild Side vient créer la surprise pour els cinéphiles mondiaux. Comment être passé à côté d'un tel talent tout au long de ces années?
D'autant plus, qu'il est même difficile de mettre la main sur l'ensemble de sa filmographie! Ses premiers films, tournés avant la seconde guerre mondiale, sont presque tous dits disparus. Parti rejoindre l'Association du Film de Mandchourie, il faudra attendre son retour au Japon au milieu des années '50s pour finalement voir ressusciter son talent. De cette période nous parvient un premier film magnifique : "Le Mont Fuji et la lance ensanglanté". Incroyable plaidoyer pour une égalité des classes, l'histoire conte la traversée du Japon par un samouraï et son serviteur. Au cours de leurs périples, ils vont être confrontés à de nombreuses inégalités sociales, telle une route barrée pour des ouvriers et badauds obligés d'attendre la fin d'un goûter de Seigneurs ayant décidé de s'arrêter en plein chemin. Le dénouement sera tragique, le maître devant se battre contre d'autres samouraïs offensés, parce qu'ils se moquaient du héros principal ayant invité son serviteur à partager une même table.
Après la réalisation d'une nihiliste trilogie du célèbre "Col du Grand Bouddha", UCHIDA raconte la terrible manipulation d'un homme d'âge mûr par une jolie fille dans "Meutre à Yoshiwara". Une nouvelle fois, l'inégalité sociale (la fille étant issue d'une pauvre famille) est au cœur du film, mais également les préjugés des congénères (l'entourage se moquant de la différence d'âge du couple et du physique ingrat du personnage principal).
Ensuite, Uchida s'attaquera à l'œuvre de sa vie, honteusement inédite dans notre pays: Miyamoto Musashi. Cette célèbre légende d'un mythique guerrier aux deux sabres parcourant le Japon pour se mesurer à d'autres adversaires est une pure merveille. A sa série originelle en cinq parties, Uchida adjoint un sixième épisode inédit, œuvre testament, puisqu'il décédera durant le tournage.
A ne pas oublier non plus son pur chef-d'œuvre "Le détroit de la faim", passionnante enquête policière sur l'assassinat d'un prêteur sur gages…et terrible constat d'un Japon en pleine après-guerre.

Le coffret édité récemment par Wild Side est donc un pur joyau du genre, mais pas assez pour rendre entière justice au génie de ce réalisateur méconnu.