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La codécision en pratique

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Message par Alex Jeu 14 Avr - 7:45

Les partisans du oui nous saoulent avec ça: la codécision. Ca y est, le parlement européen aurait enfin un petit peu de pouvoir!!!

Bon, alors regardons comment ça mrche en pratique, la codécision, qui existe déjà mais qui sera étendue à quasiment (pas tous hein!) tous les domaines si la constitution passe:

http://infos.samizdat.net/article333.html

Extrait:

... une « codécision » inefficace...
Malgré une certaine prédisposition à l’abstraction mathématique qui nous aide à comprendre le schéma décrivant la codécision, on ne comprend pas encore bien si cela donne lieu à une procédure législative démocratique ou pas.

La seule façon de le découvrir, c’est de passer la « codécision » à l’épreuve des faits.

Fort heureusement, juste avant le vote en France pour la Constitution Européenne, la communauté des informaticiens européens a pu suivre pas à pas la mise en oeuvre de cette procédure de codécision pour la directive européenne visant à introduire en Europe les brevets logiciels, interdits auparavant par la convention de Munich de 1973 et par la directive européenne de 1991 ; c’est une histoire qui a défrayé la chronique à plusieurs reprises depuis plus de quatre ans. Malheureusement, sous prétexte de technicité (ah, la technicité, encore elle !) cette affaire n’a pas été portée suffisamment à la connaissance des citoyens.

Vous ne savez pas ce que c’est un brevet logiciel ? C’est grave, parce que le futur de l’industrie informatique européenne, et de millions d’emplois qualifiés dans toute l’Europe dépend de cela, ainsi qu’une bonne partie de nos libertés et de notre indépendance, au sens le plus large : je vous conseille alors de vous informer au plus vite, par exemple en partant du site de la campagne contre les brevets logiciels [6].

Mais ce n’est pas nécessaire de savoir ce qu’est un brevet logiciel pour suivre pas à pas l’application de la procédure de codécision qui a été utilisée pour les introduire en Europe, et il s’agit d’une histoire très instructive, vu que c’est cette même procédure qui sera gravée dans le marbre si le Traité est approuvé ; asseyez-vous donc confortablement, reprenez votre souffle, et allons-y :

en 2002, la Direction du Marché intérieur de la Commission européenne (dirigée par Frits Bolkestein, plus connu en ce moment pour une autre directive dont il est aussi l’inspirateur) soumet (première étape de la codécision) la proposition de directive 2002/0047, visant à introduire en Europe les brevets logiciels sous prétexte de vouloir harmoniser les législations nationales portant sur les brevets, et entourée de déclarations de responsables selon lesquelles l’industrie informatique européenne est demandeuse de la directive ;

Toujours en 2002 Jacques Chirac, candidat à la Présidence de la République française, déclare : « Autoriser les brevets sur les logiciels mettrait l’Europe sous la coupe des entreprises américaines. Il faut refuser la vassalisation technologique vis-à-vis des Etats-Unis et soutenir le logiciel libre, la créativité de l’informatique française et européenne et notre indépendance technologique. »

en analysant le document informatique fourni par la Commission, des informaticiens découvrent qu’il a été rédigé avec l’aide matérielle de la BSA, une association privée regroupant essentiellement des grandes industries du logiciel nord-américaines

en peu de temps, des pans entiers de la société civile européenne se mobilisent contre la directive : économistes, universitaires, petites, moyennes et grandes entreprises européennes du logiciel, développeurs indépendants, acteurs du logiciel libre, hommes politiques crient haut et fort leur opposition à une directive qui menace de détruire l’industrie logicielle européenne. La CEA-PME, organisation regroupant 22 associations de PME de 19 pays différents représentant en tout plus de 500 000 entreprises, proteste vivement [7] et elle est rejointe par la CEDI (Confédération Européenne des Indépendants) et la ESBA (European Small Business Alliance), ce qui porte le total à plus de 2.000.000 de PME ; des appels signés par des scientifiques illustres sont diffusés ; des dizaines de milliers de sites web sont temporairement obscurés pour attirer l’attention sur ce projet de directive ; le site NoEPatents [8] recueille plus de 380.000 signatures, dont plus de 3.000 de PDG européens

le 24 septembre 2003, cette mobilisation sans précédents porte ses fruits : le Parlement européen tout entier (en séance plénière) vote (deuxième étape de la codécision) par 361 voix pour, 157 contre et 28 abstentions, un ensemble d’amendements à la directive, ce qui la transforme en un texte qui interdit clairement les brevets logiciels

la proposition amendée est examinée par un groupe de travail nommé par le Conseil des ministres, qui après plusieurs mois de négociations secrètes, produit un document de compromis (sic !) qui élimine les amendements du Parlement et réintroduit la proposition initiale de la Commission, durcie

le 18 mai 2004, lors d’une réunion du Conseil des ministres est voté avec une courte majorité un accord politique sur une « position commune » qui reprend le document de compromis

dans les mois qui suivent, différentes présidences tournantes (Irlande et Hollande) du Conseil essayent de transformer cet accord de principe en adoption officielle du texte sans vote (dans le jargon communautaire, cela s’appelle un A-item), trois fois, dont une, en Décembre 2004 pendant une réunion sur l’Agriculture et la Pêche (sic !) ; à chaque fois ces tentatives se soldent par un échec, grâce à l’intervention de la Pologne. Pendant ce temps là les représentants français ne disent rien

la presse se fait écho d’une rencontre en novembre 2004 entre le premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen et Bill Gates, le fondateur de Microsoft, pendant laquelle ce dernier aurait menacé de faire cesser l’activité de l’éditeur Navision au Danemark (800 emplois, rachetée par Microsoft en 2002) si la directive européenne sur la brevetabilité n’était pas adoptée.

ce même mois de novembre 2004, Bill Gates est reçu avec les honneurs usuellement réservés aux chefs d’état par Jacques Chirac, président de la république, qui avait déclaré en 2002 « le projet de directive européenne sur la brevetabilité des logiciels n’est pas acceptable » [9]

le premier février 2005, Bill Gates s’entretient à Bruxelles avec des responsables politiques

une commission du Parlement Européen demande formellement à la Commission de retirer la directive ; cette demande est ignorée ;

le 5 mars 2005, le parlement Danois vote une motion obligeant son gouvernement à bloquer la directive, si elle était reproposée

la présidence luxembourgeoise remet à l’ordre du jour d’une réunion du conseil du 7 mars 2005, toujours comme point à adopter sans discussion, et passe en force, en refusant de l’enlever de l’agenda quand le ministre Danois le demande

le représentant français ne dit rien. On est légitimement en droit de se demander ce qui s’est passé, comme tractation ou pression en novembre 2004

maintenant, (regardez à nouveau le schéma), le seul choix raisonnable du parlement devant le mépris profond et l’obstination du Conseil est de rejeter la directive, mais pour cela il faut la majorité des membres élus (et non pas des votants)

Vous êtes perdus ? C’est normal, mais ne paniquons pas, on peut tout résumer en quelques lignes : une directive est proposée par la Commission, contenant des propositions qui semblent issues de groupes de pressions nord-américains, mais que la Commission prétend être simplement une réponse aux demandes de l’industrie européenne ; des centaines de milliers de professionnels de l’informatique, et des associations regroupant plus de deux millions de PME européennes, concernés au premier chefs par la directive, s’insurgent et déclarent qu’ils n’en veulent pas, qu’elle pourrait détruire l’industrie européenne du logiciel ; le parlement européen entend ce cri de douleur et modifie la directive pour retirer le brevet logiciel ; la présidence du conseil des ministres décide d’ignorer les modifications du parlement, les protestations de la société civile, l’opposition de plusieurs membres du conseil des ministres (Pologne, Danemark, etc.), la demande de la commission du parlement, et passe enfin en force ce texte après des visites et pressions suspectes de PDG de grands groupes nord-americains, laissant maintenant le parlement avec comme seule option de rejeter le texte, mais avec une majorité qualifiée.

Est-ce cela de la démocratie ? Absolument pas. Mais, vous me direz, ce n’est pas le rôle de la Communauté Européenne que d’être démocratique, avant l’arrivée de la Constitution.

D’accord, posons alors une autre question : est-ce cela défendre les intérêts économiques européens ? Pas non plus. Cela ressemble beaucoup plus au succès d’un lobby industriel nord-américain contre l’ensemble de la société civile européenne.

Et alors ? Et alors, me direz vous, on a besoin de la Constitution, pour que cela n’arrive plus jamais.

... et une Constitution qui veut les prolonger à jamais...
Revenons donc à notre Constitution, avec l’espoir fervent d’y trouver de quoi s’assurer que la démocratie triomphe, ou tout au moins, que l’intérêt économique européen soit préservé !

Mais on a beau chercher désespèrement, il n’y a pas dans ce projet de Constitution la moindre avancée démocratique :



pas de référendum populaire

pas d’initiative législative populaire : pour s’en convaincre, l’article I-47.4, que certains avancent comme LE exemple d’initiative populaire, mérite d’être lu dans sa totalité

Des citoyens de l’Union, au nombre d’un million au moins, ressortissants d’un nombre significatif d’États membres, peuvent prendre l’initiative d’inviter la Commission, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu’un acte juridique de l’Union est nécessaire aux fins de l’application de la Constitution. La loi européenne arrête les dispositions relatives aux procédures et conditions requises pour la présentation d’une telle initiative citoyenne, y compris le nombre minimum d’États membres dont les citoyens qui la présentent doivent provenir.

pas d’initiative législative du Parlement Européen,


au contraire, la procédure de codécision, dont on vient de voir le peu d’efficacité qu’elle peut avoir face à des présidents du Conseil arrogants et méprisants, est gravée dans le marbre comme LA procédure législative de l’Union Européenne, et étendue à une pluralité d’autres domaines :


http://www.constitution-europeenne.fr/index.php ?id=31 :
Par rapport au traité de Nice et au traité d’adhésion d’Athènes, la répartition des pouvoirs est sensiblement modifiée. La procédure de codécision, qui place le Parlement européen aux côtés du Conseil, en tant qu’organe législatif, devient la procédure législative ordinaire. 95% des lois européennes seront adoptées conjointement par le Conseil et le Parlement européen.

Ceci n’est pas une « augmentation des pouvoirs du Parlement », mais l’extension à tous les domaines d’une procédure dans laquelle les faits ont montré que le pouvoir du Parlement est marginal.

Mais ce texte constitutionnel fait bien pire ! Si on ne regarde que le sujet des brevets logiciels, que nous venons de voir en détail, elle :

grave dans le marbre (art. II-77-2) la protection de la « propriété intellectuelle » (qui inclut ces brevets logiciels que des pans entiers de la société européenne ne veulent pas)

enlève au parlement tout rôle lorsqu’un traité sur, par exemple la propriété intellectuelle, est negocié par l’union (art. III-315-3)

diminue les recours et les devoirs du tribunal pour les procédures liées à la propriété intellectuelle, seule exception reconnue (Protocole fixant le statut de la CJUE, Titre III, Article 53)

Autrement dit, ceux qui ont rédigé ce texte constitutionnel semblent avoir été « aidés » dans leurs travaux par les mêmes conseillers qui ont « aidé » la Commission à élaborer la directive sur les brevets logiciels.

Or, si on a trouvé dans ce texte constitutionnel ces trois articles faits sur mesure pour les lobbies nord-américaines et contre l’intérêt de l’industrie Européenne dans le domaine du logiciel, combien d’autres mesures catastrophiques, dans d’autres domaines, se cachent dans les autres 445 articles éparpillés sur les 474 pages ?

On sort de cette analyse du texte constitutionnel avec la sensation très désagréable d’avoir été lourdement trompés sur la marchandise : on veut tous une Europe forte, unie, indépendante, démocratique ; on découvre au contraire un mélange inextricable d’intérêts particuliers et de pouvoirs soustraits à tout jugement démocratique.
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Message par sorlac Jeu 14 Avr - 9:16

Et la, bande de connards eurosceptique,
En France, au dernier sondage ils sont plus nombreux que la bande de connards eurolibéraux !
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Message par Alex Ven 15 Avr - 10:12

Bien, les gens opposés au TCE qui nous soulent que la volonté nationale de la France est bouffée par le "diktat de Bruxelles", peuvent prendre ce cas en exemple.

Mais mon pauvre Das_yog, je n'ai de cesse de répéter que ce sont les même qui prennent des décisions au niveau national et au niveau européen!!!

Après c'est sûr, si tu parles des De Villieriste...
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