Ca se passe comme ça, à la Poste!

A la distribution, le lendemain de Noel, la direction a convoqué un collègue pour "rompre sa période d'essai" , avec, selon la direction, l'accord de l'intéressé. La direction a donc renvoyé au chômage quelqu'un au motif qu'il était trop lent et rentrait trop tard de tournée.
Pourtant le 16 novembre dernier, lors du dernier chsct, le directeur du centre affirmait devant les représentantsdes organisations syndicales qu'il tiendrait compte de la bonne volonté des nouveaux embauchés, y compris de ceux qui connaissaient quelques difficultés dans leur apprentissage.
Jean-Claude, ancien cadre dans une librairie, embauché à la Poste le 12 octobre 2006, correspondait à ce profil.
Des difficultés dans son apprentissage, certes, il en connaissait. Mais comment pourrait il en être autrement, quand après avoir fait toute sa carrière dans un métier aussi différent que celui de libraire, on se retrouve après 3 ans de chômage, à 51 ans, à devoir accepter "un travail physique et dur où il faut se lever tôt" (propos du directeur lors du chsct) comme celui de facteur?
Quant à la "bonne volonté"; quand on rentre après avoir été jusqu'au bout de ses tournées, à 14 heures 30, voire 15 heures 3, en étant ponctuel chaque matin, comment prétendre que Jean-Claude en manquait?
Les difficultés à suivre les cadences, les dépassements d'horaires, seraient donc des fautes inadmissibles à la Poste? Quel culot!
Qui supprime chaque année des emplois? Qui ne cesse de rallonger les tournées? Qui d'entre nou, depuis la dernière réorganisation, n'a ps eu de difficultés à s'adapter aux nouvelles tournées? Combien d'anciens ont préféré partir plutôt que de continuer à travailler dans ces nouvelles conditions?
En réalité, hormis son âge, la situation du "jeune facteur" de 51 ans qu'était Jean-Claude n'avait rien d'exceptionnel. Nul doute qu'avec le temps, il se serait adapté comme bien d'autres collègues avant lui qui ont connu des difficultés, même plus jeunes, ou qui ont eu un an de période d'essai (c'était la règle pour les fonctionnaires). Et même si son âge était un handicap, il y a encore bien d'autres emplois à la Poste ou ce collègue aurait pu être orienté, si la Direction l'avait voulu.
De toute façon, en acceptant d'embaucher Jean-Claude, la Poste devait se rendre compte que l'on ne demande pas la même facilité d'adaptation à un jeune de 20 ans qu'à un ancien de plus de 50 ans.
Après plusieurs années de chômage, Jean-Claude espérait que la Poste lui ouvre une porte pour se réinsérer dans le monde du travail. Le 26 décembre, la direction de Paris 14 lui a claqué la porte sur les doigts. C'est encore pire que si elle ne l'avait jamais ouverte!
Jusqu'à il y a 15 jours, Jean-Claude n'avait pas de problèmes avec la hiérarchie. Certes, après 2 mois, il faisait les recommandés plutôt quele papier, mais ce n'était pas de son fait. Aussi, dès qu'il a commencé à sortir des tournées sur le quartier 19-11 ou le 18-31 (qui ne sont pas des tournées faciles, bien des collègues peuvent en témoigner), à la difficulté propre de ses tournées est venue se rajouter les difficultés que connaissent la plupart des débutants (être paumé devant les boîtes).
Au lieu de se montrer compréhensifs, comme dans les discours de la direction, à 15 heures 30, le jeudi 14 déembre, plusieurs cadres digérant tranquillement leur repas de Noel de la cantine, attendent de pied ferme notre collègue qui avait fait 4 dépôts et que l'on peut imaginer fatigué et affamé. Il est convoqué, sans défenseur, pr le directeur , en présence de plusieurs cadres, et il devra supporter les sarcasmes du directeur sur son travail, qui lui laisse entendre qu'il ne sera de toute façon pas gardé et que Jean-Claude comprendra comme une invitation à démissionner, ce qu'il refuse.
Le lendemain, des consignes seront données aux capros (chefs d'équipe), pour que notre collègue sorte tous les jours "le papier" au lieu d'une fois sur deux, et surtout que le titulaire ne l'aide ps à faire ses dépôts.
C'est du jamais vu! La Direction prétend que c'était pour son bien. Drôle de méthode pédagogique. Nous-mêmes, et c'est heureux, entre facteurs, nous nous aidons très souvent de cette façon. La devise de la Poste serait elle celle qu'on attribue à la légion : "marche ou crève"?
Le vendredi, il rentre à 13 heures 15, le samedi, à 14 heures 30. Tous les jours, il sera attendu par un cadre. Comble du ridicule, il se fera même reprocher de ramener du courrier qu'il n'a pas pu distribuer (ce qui, tout le monde le sait, est extrêmement grave, pour un rouleur...). La semaine suvante, la Direction dit lui donner une seconde chance en le mettant sur une autre tournée.
Après 3 jours de doublure, il sortira le papier tous les jours sur le secteur 12-11, et rentrera tousles jours suivants à 14 heures 30. Chauqe jour, un cadre l'attend.
Les tous derniers temps, Jean-Claude pense même que l'attitude de la hiérarchie change ensa faveur. Mais, le 26 décembre, lendmain d'un long week-end, après sa tournée, à 14 heures 30, il est convoqué après l'heure légale de vacation et sans défenseur, chez les cadres, où lassé, il accepte la "proposition" de la Direction de mettre fin à sa période d'essai.
Ce qui ne veut pas dire que ce collègue ne voulait pas rester.
Lorsque ous sommes descendus, nombreux, demander des comptes à ceux qui étaient responsables dela mise au chômage de Jean-Claude, beaucoup ont été surpris par les arguments "humanitaires" d'un cadre qui s'inquiétait de la santé de ce collègue qui rentrait tard de tournée sans avoir mangé. Quelle sollicitude! C'est sûr qu'avec ses indemnités journalières de fin de droit, Jean-Claude aura moins de soucis de ce côté là...
Nous n'avons pas réussi à empêcher que ce collègue soit viré, mais la direction sait maintenant que son mauvais coup ne s'est ps fait en notre nom. S'attaquer au gagne-pain d'un homme qui ne demandait qu'à travailler est ignoble.
"Il faut se mettre à la place des employeurs" argue la Direction. Mais quand elle, se met-elle à notre place? A celle de Jean-Claude, 51 ans, chômeur? Ce qui arrive à ce collègue, nous arrivera peut-être demain. Tomber dans le chômage, c'est l'angoissse de tous les travailleurs, car c'est le risque de se retrouver un jour dans la même situation que la centaine de milliers de SDF de ce pays.