Dernier rempart contre le liberalisme
Nous refusons l'idéologie libérale parce qu'elle est
incapable de fournir un sens, une voie a la reconciliation
de l'individu avec son semblable dans une communauté
qu'on pourrait qualifier d'humaine,
Et d'ailleurs le but qu'elle se propose est meme tout
différent.
Nous refusons l'idéologie libérale au nom de l'encyclique
de Léon XIII sur la mission sociale de l'Evangile et dans le
meme esprit que les prophetes antiques appelaient la ruine
et la malédiction sur la tete de Jerusalem,
Et Jérusalem tomba, et pour se relever elle ne mit pas
moins de quatre mille ans,
Il est indiscutable et avéré que tout projet humain se voit
de plus en plus évalué en fonction de purs criteres
économiques,
De criteres absolument numériques,
Mémorisables sur fichiers informatiques.
Cela n'est pas acceptable et nous devons lutter pour la mise
en tutelle de l'économie et pour sa soumission a certains
criteres que j'oserai appeler éthiques,
Et quand on licencie trois mille personnes et que j'entends
bavasser sur le cout social de l'opération il me prend une
envie furieuse d'etrangler une demi-douzaine de conseillers
en audit.
Ce qui serait une excellent opération,
Un dégraissage absolument bénéfique,
Une opération pratiquement hygiénique.
Faites confiance a l'initiative individuelle, vola ce qu'ils
repetent partout, ce qu'ils vont partout répétant comme
ces vieux réveils a ressort dont l'uniforme déclic suffisait généralement a nous plonger dans une insomnie fatigante
et definitive,
A cela je ne peux répondre qu'une seule chose, et cette chose ressort d'une expérience a la fois navrante et
répétitive,
C'est que l'individu, je veux parler de l'individu humain,
est tres généralement un petit animal a la fois cruel et
misérable,
Et qu'il serait bien vain de lui faire confiance a moins qu'il
ne se voie repoussé, enclos et maintenu dans les principes
rigoureux d'une morale inattaquable,
Ce qui n'est pas le cas.
Dans une idéologie libérale, s'entend.
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Le but de la vie, c'est d'aimer
Chacun le dit, chacun le sait
Tes paroles sont inutiles
Je ne sens plus ton corps fragile
Et le but de ma vie s'efface
Droit devant, la tour Montparnasse
Dont les étages au ralenti
S'allument comme un reve englouti.
Nous traversons le commercial
Comme une enveloppe irisée
Dont les stimuli névrosés
Délimitent un destin brutal
C'est notre vie, c'est notre mort
Qui se dessinent sur les rśeaux
La ville nourrit ses bourreaux
Et le dégout emplit nos corps.
Experiences inarticulés,
J'achete des revues sexuelles
Remplies de fantasmes cruels
Au fond, il faut éjaculer
Et s'endormir comme une viande
Sur un matelas défoncé
Enfant, je marchais dans la lande
Je cueillais des fleurs recourbées
Et je revais du monde entier
Enfant, je marchais dans la lande
La lande était douce a mes pieds.
Michel Houellebecq (Le sens du combat - 1996).
Y a pas, j'adore tout ce qu'il fait !